Par Veronica Aimar
Le conflit de travail des juristes de l’État québécois a eu, sans doute, des répercussions sur les dossiers d’actions collectives. Le nombre de demandes d’autorisation contre le gouvernement du Québec n’est pas négligeable. Dans Abihsira c. Société de l’assurance automobile du Québec (2017 QCCS 611), l’honorable juge Pierre C. Gagnon rejette la demande de suspension de l’instance de la S.A.A.Q., et réitère l’importance d’éviter le prolongement injustifié de l’étape de l’autorisation de l’action collective.
En novembre dernier, une demande d’autorisation fut déposée contre la S.A.A.Q. en contestation des frais additionnels exigés aux automobilistes ayant des points d’inaptitude dans leurs dossiers lors du renouvèlement du permis de conduire. En tant que société d’État, les juristes de l’État agissent pour la S.A.A.Q. à titre de procureurs.
Face au conflit de travail des juristes de l’État qui perdure, la défenderesse s’est dite ne pas être en mesure de produire les demandes préliminaires à temps. Elle argument que les dossiers d’actions collectives ne soulevant pas de problématiques urgentes, ils devraient être exclu des « services essentiels » à être servis lors de la grève. La S.A.A.Q. demanda ainsi la suspension de l’action collective jusqu’à la fin du conflit de travail. Le demandeur ne s’opposait pas à cette demande, mais souleva que la suspension devrait avoir un terme déterminé. Dans un jugement récent, le juge Gagnon, rejette la demande. Il explique que :
[20] Sauf erreur, la décision du TAT ne traite nulle part des actions collectives spécifiquement. Les parties paraissent avoir convenu implicitement qu’aucune action collective ne peut soulever des problématiques urgentes requérant de faire appel à des services essentiels. Mais tel consensus ne lie pas la Cour supérieure.
[21] Le Code de procédure civile confère à la Cour supérieure la gestion des actions collectives, en veillant à l’application des principes directeurs de la procédure et de la philosophie énoncée à la disposition préliminaire.
[22] Clairement, le TAT n’a jamais eu l’intention ou le projet de dicter à la Cour supérieure la façon de gérer ses instances judiciaires en général, et les actions collectives en particulier.
[23] La Cour supérieure doit, en matière de gestion de l’instance, prendre ses décisions en appliquant le Code de procédure civile. La Cour supérieure ne doit pas se laisser influencer indûment par des répercussions sur l’une et l’autre parties au conflit de travail, à savoir si certaines activités relèvent des services essentiels et d’autres pas.[1]
Suite à l’adoption de la loi forçant le retour au travail des juristes de l’État, soit la Loi assurant la continuité de la prestation des services juridiques au sein du gouvernement et permettant la poursuite de la négociation ainsi que le renouvellement de la convention collective des salariés assurant la prestation de ces services[2], il reste à voir si le gouvernement accordera un traitement particulier aux dossiers d’action collective, compte tenu du nombre important de justiciables qui y sont impliqués.
[1] 2017 QCCS 611
[2] L.Q. 2017, ch. 2.
Ce contenu a été mis à jour le 28 mars 2017 à 15 h 06 min.
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